Le château du Haut-Koenigsbourg
Secrets de châteaux – n°2 | Haut-Kœnigsbourg
Le “haut-château du roi”, littéralement, est un château fort alsacien, qui se dresse en haut d’un col montagneux.
Construit en toute illégalité par un seigneur sur des terres qui ne lui appartenaient pas, le château et ses terres sont disputés pendant des siècles – au même titre que l’Alsace et la Lorraine – par deux pays différents : d’une part la France, et de l’autre l’Allemagne.
Dans cet article, nous allons découvrir le projet de l’empereur Guillaume II pour le château, lorsque l’Alsace devient allemande en 1871 à la suite de la Guerre franco-prussienne.
Quelques lignes de sa tumultueuse histoire
En 774, le roi Charlemagne fait don prieuré de Lièpvre du col nommé Stophanberch et des terres attenantes.
Les premières traces du château avec les Hohenstaufen
En 1079, non loin, sur les terres du Saint-Empire romain germanique, le duc de Souabe fait construire un château sur le mont Hohenstaufen, près de Göppingen, qui lui donne son nom de sa famille.
Afin de renforcer le pouvoir des Hohenstaufen en Alsace, qui était une région très importante stratégiquement, on construit de nombreux châteaux afin de créer une ligne de défense, mais certains châteaux sont construits sur des terres n’appartenant pas au Saint-Empire.
C’est ainsi qu’on a fait construire en toute illégalité le château du Haut-Kœnigsbourg, sur les terres confiées initialement aux moines de l’abbaye de Lièpvre.
Situé sur un col rocheux, le château est en fait un observatoire idéal des principales routes commerciales de la région qui se croisaient aux environs de la ville de Sélestat : la route du blé et du vin qui reliait l’Italie aux actuels Pays-Bas, ainsi que la route du sel et de l’argent reliant les provinces de Lorraine aux régions germaniques situées à l’est du Rhin.
Après plusieurs propriétaires successifs, le château devient un repaire de chevaliers brigands. Afin de les déloger, une coalition de 500 hommes des villes aux alentours se forme et le château est conquis, puis incendié.
La restauration des Thierstein
Le château reste en ruine longtemps, jusqu’à ce qu’il soit confié en 1479 à une famille suisse, les Thierstein.
La famille met en place un système défensif conçu pour faire face à des tirs d’artillerie. Pour cela, ils bâtissent des tours et des murs d’enceinte. Cependant, ils n’arrivent pas à faire face aux frais d’entretien du château, et le château se voit à nouveau à l’abandon…
En 1633, la forteresse délabrée est à nouveau détruite par un incendie après le siège des Suédois durant la Guerre de Trente Ans, le conflit opposant les suédois à l’Autriche qui a ravagé l’Alsace.
La commune de Sélestat achète les ruines du château en 1865.
Le projet de l’empereur Guillaume II
Depuis 1871 et le traité de Francfort, l’Alsace est devenue allemande.
Le 4 mai 1899, les ruines du château et les terres l’entourant sont offerts par la ville de Sélestat à l’empereur Guillaume II de Hohenzollern.
L’empereur souhaite y créer un musée promouvant l’appartenance germanique de l’Alsace et, plus généralement, le monde germanique. Par ce geste, il souhaite ressusciter l’époque des chevaliers et d’un Moyen Âge imaginé, tout en redonnant au château son prestige des alentours de l’an 1500. Le but de ces opérations était notamment de développer l’activité touristique de la région.
Son ambition est grande, et beaucoup de moyen sont mis en place pour y répondre.
De plus, la restauration de ce château-fort marque symboliquement la limite occidentale de l’Empire allemand, tout comme le château de Marienburg en actuelle Pologne, marque la limite orientale.
L’architecte et archéologue Bodo Ebhardt, souhaite restaurer le château tel qu’il se présentait aux alentours de l’an 1500.
Chargé de la restauration, il s’appuie sur des principes scientifiques rigoureux, compte tenu des connaissances de l’époque : il répertorie tous les vestiges archéologiques recueillis sur les lieux, étudie les documents d’archives, analyse l’architecture et les débris présents sur le site… En cas d’incertitude, se réfère à des modèles choisis parmi les édifices contemporains proches.
Guillaume II vient régulièrement visiter le chantier. Il est d’ailleurs logé dans la gare de Saint-Hippolyte reconstruite spécialement pour l’accueillir en 1903.
La restauration dure 8 ans.
En 1919, à l’issue de la Première Guerre mondiale et en application de l’article 56 du traité de Versailles, le château entre en possession de l’État français lors de la restitution de l’Alsace-Lorraine.