Nouvelle-Aquitaine

Le château de Roquetaillade

Secrets de châteaux – n°4 | Roquetaillade

Deux châteaux

Le château de Roquetaillade est en fait un ensemble de deux châteaux ainsi qu’une église construits dans la même enceinte, située en Nouvelle-Aquitaine, dans le département de la Gironde.
Construits côte à côte, les vestiges de pierre du Vieux château remontent au Xe siècle tandis que le  château Neuf date du début de XIVe. Celui-ci est bâti à la demande de Gaillard de La Motte.

Le vieux châteaux

Selon la tradition orale, une première fortification en bois se fait construire à Roquetaillade sous les ordres de Charlemagne. La simple motte féodale entourée de sa palissade en bois subit par la suite d’importantes modifications pour devenir une forteresse en pierre. Sur cette longue période, de nouvelles constructions défensives, des tours, barbacanes et remparts se superposent au bâtiment primitif qui finit par disparaître.
L’envergure du site reflète l’importance politique des La Motte (Barons de Bazas et de Langon) et la puissance de la seigneurie de Roquetaillade à l’époque.

La fin de la guerre de Cent Ans en 1453 marque un retour à la sécurité et l’enceinte protectrice du bourg perd de son intérêt. La ville sera lentement abandonnée et, à la fin du XVIe siècle, elle avait totalement disparu.

Le château Neuf
En 1306, l’Aquitaine est un fief appartenant au roi d’Angleterre. Avec la permission de celui-ci, le cardinal de la Motte, neveu du pape Clément V, se fait bâtir un tout nouveau château à Roquetaillade.

Deux raisons expliquent la création d’un deuxième château sur le site de Roquetaillade.
Premièrement, les moyens financiers du nouveau pape Clément V et les charges qu’il a données à son neveu ont certainement participé à la décision.
L’autre raison valable est qu’il n’y avait pas de puit au Vieux Château : il était seulement équipé d’une citerne pour récupérer les eaux de pluie et d’une source se trouvant dans les remparts, au débit incertain et difficilement défendable. Cela pouvait être un énorme handicap en cas de long siège.
Cette nouvelle construction de plan carré avec six tours et un donjon central concentrait toutes les dernières innovations et techniques de défense active. Il est efficace de par sa simplicité.
Outre qu’un moyen de défense, on recherche un certain confort seigneurial : le château de Roquetaillade, ainsi que les autres châteaux dits clémentins (châteaux construits par la famille du pape : Villandraut, Budos, Fargues, du Hamel…), sont les premiers exemples de palais-forteresses en France.

D’ailleurs, les influences anglaises se ressentent dans le style du bâtiment. C’est ainsi que dans de nombreux films Roquetaillade se retrouve situé en Grande-Bretagne (Fantômas contre Scotland Yard, Les Séducteurs, Highlander).

La grande restauration 

Deux restaurations majeures peuvent être retenues. Une  première à la Renaissance où les fenêtres du premier étage sont percées permettant à la lumière de pénétrer afin de d’aménager  des appartements dotés de somptueuses cheminées.​ 

La seconde amène le confort et des décors uniques à Roquetaillade grâce au grand architecte de l’époque Eugène Viollet-le-Duc.
L’ampleur des travaux est colossale : Viollet-le-Duc veut en faire son rêve médiéval. Après de multiples études, et après avoir choisi jusqu’à la moindre tapisserie, le château devient  mi palais, mi château fort. Le chantier dure de 1864 à 1878, avec une interruption après la chute de Napoléon III en 1870.

Accaparé par de nombreux chantiers, Viollet-le-Duc a pour habitude de déléguer des chantiers à ses élèves. Celui qui sera chargé du chantier de Roquetaillade sera Edmond Duthoit, descendant d’une longue lignée de tailleurs de pierre, une profession que Viollet-le-Duc admirait beaucoup et qu’il dénommait les “imagiers du Moyen-âge”. Il applique à la lettre toutes les recommandations du maître en y ajoutant quelques inspirations de ses voyages, notamment en Orient.

Un manifeste

Roquetaillade est le seul exemple en France d’une opération complète exécutée par Viollet-le-Duc : restauration, création, décoration, mobilier, organisation sociale et intendance.
C’est une dictature de style où rien n’est oublié et sans aucune place pour autre chose, un « art total », système esthétique que Viollet-le-Duc avait essayé d’imposer aux Beaux-Arts mais qui sera repris par certains artistes se réclamant de l’Art nouveau comme Gaudi, Horta ou Guimard, qui ont tous été inspirés par Viollet-le-Duc.